Le temple des Lamas est un des plus célèbres temples bouddhistes de Pékin, connu de tous les touristes et visiteurs de la capitale chinoise, consacré au courant
Vajrayana (bouddhisme tantrique).
Situé au Nord-Est de l'ancienne
Cité Tartare, ce petit joyaux est fortement reconnaissable par ces toits jaunes, héritage de son ancien statut de palais impérial. Il s'agit de nos jours du plus vaste édifice religieux de Pékin Intra-muros (comprenez au sein du tracé de la vieille muraille!
Le Temple du Ciel étant à l'extérieur de cette dernière...).
Pavillon Falun, vue arrière depuis la dernière cour.
Sa petite histoire : Temple à part à Pékin,
Yong He Gong (雍和宫 - Palais de l'Harmonie Eternelle) fut batti en 1694 comme palais pour le 4eme fils de l'empereur Kangxi. Quand ce dernier accèda au trône à la mort de son père sous le nom de Yongzheng, son palais princier devint un palais impérial, échangeant ses tuiles vertes contre celles jaune d'or (couleur réservée à l'empereur, fils du ciel). Puis en 1732, les premiers lamas s'installèrent.
Mais c'est enfin en 1744 que son fils Qianlong cèda le palais personnel paternel aux moines d'obédience tantrique et fit venir s'y installer plus de 500 moines et novices aux origines tibétaines, chinoises, mongoles et mandchoues (à l'image de la diversité des peuples de son empire).
Il reste encore aujourd'hui dans le temple et le quartier quelques vestiges de son passé profane.Tout d'abord dans les tuiles jaunes restées sur les toits qui scintillent sous le soleil au petit matin et attirent les regards depuis le 2eme Périphérique qui passe au Nord.
Puis dans le nom des ruelles qui entourent le temple. Il vous semblera peut-être normal de savoir que le théâtre qui faisait parti du palais fut séparé du temple, des moines en ayant peu utilité!!
Dans "
Pékin au détour des rues et des ruelles", Roger Darrobers vous indique le chemin pour aller croiser cette
Ruelle du Pavillon de Théâtre (Xilou Yixiang). Elle longe le temple par le Sud et l'Est , là où se trouvait autre fois ce dernier vestige de ce qui fut un palais. Le Théâtre brûla sous le règne de Qianlong et le fils de Yongzheng y perçut un signe divin... Il le laissa ainsi!
Enfin, l'ensemble du Temple est établi sur un alignement Nord-Sud respectant les règles du Yi Jing et surtout une succession de salles se rapprochant plus de la Cité Interdite que du temple bouddhiste habituel.
Protégé tout au long de la dynastie Qing, le temple fut malheureusement abandonné à son sort à la fin de l'histoire de l'Empire du Milieu.
Les cartes postales du Caporal Paoli en témoignent, les lieux en 1908 semblent abandonnés aux maigres soins de quelques pauvres moines.
Il faudra attendre 1949 et l'avènement de l'ère communiste pour que
Yonghegong se trouve un nouveau mécène. Dès les années 50, le nouvel état chinois aloue de fortes sommes à la restauration du patrimoine de la capitale, entre autre au
Temple des Lamas.
Quand à la triste période de la Révolution Culturelle,
Yonghegong sera miraculeusement épargné grâce à son protecteur en titre, le premier ministre Zhou Enlai, qui en ordonna la fermeture.
Après les heures noires de l'Histoire de la Chine Moderne, le retour d'une certaine liberté religieuse en 1981 (avec l'amendement de Deng Xiaoping à la constitution chinoise),
Yonghegong réouvrit ses portes aux religieux et aux profanes, devenant un des premiers lieux touristiques de Pékin!
Finalement, depuis 1990, le temple figure au Guiness book of Records pour la plus grande statue de bois sculptée qu'elle abrite, un magnifique Bouddha Maitreya offert à Qianlong par le VIIe Dalaï lama, extrait d'un seul et unique tronc de santal...
Le temple aujourd'hui : Depuis sa réouverture en 1981,
Yonghegong abrite en permanence quelques 70 moines de la secte des Gelugpa (ou Gelukpa) aussi nommée "secte des bonnets jaunes". Leur chef spirituel n'est autre que le Dalaï Lama.
On peut apercevoir les logements des moines depuis le 2eme Périphérique, ils se situent au Nord du Temple.
Pailou d'entrée.
Visite guidée du temple : L'architecture grandiose, extérieure comme intérieure, mélange avec rafinement les styles mandchous, chinois (Han), tibétains et mongoles, assurant un écrin hors norme à l'art religieux exposé, principalement composé de statues et de peintures (thangka et mandala).
L'ensemble donne un contraste magnifique et inhabituel à travers toute la Chine. Certainement le plus beau temple de toute la capitale!

Sur son plan Nord-Sud, l'accès se fait, comme dans tout palais qui se respecte, par la porte du Midi. Sur le bord de l'avenue Yonghegong (Yonghegong Dajie), un double
Pailou (portique) annonce l'importance du résident des lieux, le plus grand Bouddha de bois sculpté au Monde!
Passé les pailou, une longue allée vous guide jusqu'à la véritable entrée. L'été, l'ombre des arbres qui la bordent apporte un peu de fraicheur au touriste étourdi par la chaleur lourde et humide de la capitale chinoise. En hiver, le vent froid s'y engouffre et l'on presse le pas!!
Enfin, vous voici dans la première cour. De chaque côté se dressent les tours de la cloche et du tambour, ainsi que des kiosques abritants les stèles de fondation, comme dans tous les temples.
Reproduction miniature d'un ville mais totalement religieuse, le temple est organisé comme un palais ou un jardin : un microcosme dans le macrocosme. Les éléments primordiaux de la vie humaine sont ainsi reproduits à l'échelle de la vie interne du temple. La cloche rythmant les heures de prière et de labeur de la journée, le tambour rythmant les veilles de la nuit...
Un premier batiment percé de trois arches se dresse devant vous, il s'agit de la Porte de l'Harmonie Eternelle, aussi nommée
Tianwang dian (la salle des rois célestes).
Devant vous, assis sur son trône et souriant de toute sa joie, voici le bouddha
Milefo, alias
Maitreya, symbolisant l'Avenir. Autour de lui, effrayants et colorés, se dressent les quatres rois célestes, gardiens des points cardinaux. N'oubliez pas d'admirer les Thangka (peintures sur tissu) en contournant le trône de Maitreya.
Derrière, une autre statue vous attend. Il s'agit de
Weituo, célèbre bodhisattva, protecteur de la doctrine bouddhiste et armé pour terrasser l'ignorance, les démons et l'intellect inférieur.
Weituo, le guardian de la doctrine bouddhiste, statue de bois de santal doré. En ressortant, une cour se dessine devant vos yeux et perché sur un tertre, voici un pavillon abritant une stèle gravée dans les 4 langues officielles de l'état mandchou (Mandchou, chinois, tibétain et mongole) sur ordre de Qianlong en 1792. Les lignes qui courent sur la pierre grise racontent l'histoire du lamaïsme.
De chaque côté de la cour les salles annexes dites de l'Exotérisme et de l'Esoterime abritent aujourd'hui des galeries présentant de magnifiques objets d'art tantriques.
Au Nord, le pavillon de l'Harmonie Eternelle,
Yonghe dian, vous présente les statues dorées des bouddhas du futur, du passé et de l'avenir. De chaque côté de la salle, les deux rangées de 9 bodhisattavas forment les 18 luohan (en sanskrit :
arhat, les disciples directes du Bouddha parvenus au Nirvana).
Dans la cour, faites tourner les moulins à prière situés sur le côté ou bien brûlez un peu d'encens pour attirer la protection des trois bouddhas sur votre voyage!
Enfin, le troisième pavillon principal,
Yongyou dian la salle de l'éternelle protection, figure trois autres statues principales. Il s'agit du bouddha de la Longévité, celui de la Médecine et enfin le lama qui initia l'empereur Qianlong (à gauche).
Cartouche portant le nom du pavillon Yongyou dans les 4 langues présentent dans le Temple :
(de droite à gauche) mandchou, chinois, tibétain, mongole.
La quatrième cour, composée des salles de l'accompagnement Ouest et Est, présente une galerie de yabyum, autrement dit de divinités en union sexuelle. Ces statues symbolisent l'activité de la divinité complète, soit l'énergie mâle passive et l'énergie femelle active.
Le pavillon de la Roue de la Loi,
Falun dian, abrite quand à lui la statue de bronze doré du célèbre
Tsong Khapa (1357 -1419), fondateur de la "secte du bonnet jaune", ainsi que des fresques représentant sa vie. L'architecture du batiment est ici totalement tibétaine, offrant de longues allées de coussins aux moines résidents du Temple pour la prière et la méditation. Si vous prennez garde, les sutras en rouleaux sont conservés sur les étagères du mur gauche.
Enfin, derrière la statue du saint homme, on peut admirer une imposante sculpure de bois de santal représentant le mont Suméru (montagne sacrée du Bouddhisme). On y compte quelques 500 figures de luohan en or, argent, cuivre et fer.
Enfin, la dernière coure se devine et face à vous se dresse le Pavillon des dix milles bonheurs,
Wanfuge. Splendeur sur deux étages fait de pourpre et d'or, notez les passages aériens couvert entre le pavillon central et ces deux voisins, uniques et caractèristiques de Yonghegong.
Passez le pas de porte et admirez le chef d'oeuvre du Temple, le plus haut bouddha sculpté d'un seul morceau de bois au monde. Ce
Maitreya là n'est pas avachi sur un trône mais se tient bien debout, la main droite levée en signe de paix, la gauche baissée prennant la Terre à témoin.
Il fut offert par le septième Dalaï Lama à l'empereur Qianlong et le batiment dut être totalement reconstruit autour de son imposante stature de 18 mètres, dont 6 sont enterrés pour l'aider à tenir debout!
N'oubliez pas, dans les pavillons latéraux, tout au long de la visite du temple, différentes salles d'exposition vous présentent des oeuvres de la statuaire tantrique de bronze, d'or, d'argent ou même de fer, ou des peintures. Certaines pièces sont exceptionnelles!
Pavillon Wanfuge, abritant le bouddha Maitreya offert par le VIIe Dalaï Lama.
Un temple politique ? Yonghegong ne repose pas seulement sur la piété d'un empereur particulièrement dévot mais bien sur l'importance politico-religieuse du courant Vajrayan qui existant déjà à l'époque.
Loin du conflit actuel qui secoue la Chine et le Tibet depuis les années 50, les empereurs Qing, en dirigeants intelligents et éclairés, avaient totalement saisie l'importance des religions pour souder un Empire aussi vaste et culturellement fractionné que le leur.
L'Empire du Milieu se constituait alors principalement d'un territoire chinois (Han), de la Mandchourie (d'où étaient originaires les Qing), d'une partie de la Mongolie et du Tibet... Les chinois, Han, étaient principalement des bouddhistes suivant le courant Matrayana (autrement dit grand véhicule), quelques musulmans et des religions minoritaires comme juives, chrétiennes... Les mandchous étaient à l'origine un peuple animiste. Les tibétains étaient majoritairement des bouddhistes tantriques, tout comme les mongoles... qui formaient la grosse épine dans le pied des Qing.
Quand les Qing prennent le pouvoir, en 1664, ils sont les usurpateurs pour les chinois Han, mais aussi pour les tibétains et les mongoles.
Qui plus est, les seigneurs des grandes tribues mongoles se sont institués protecteurs attitrés du Dalaï Lama et des grands dirigeants tibétains depuis des siècles. Le peuple mongole, profondément lamaïste, était acquis à cette cause que défendaient leurs chefs farouchement opposés à la dynastie Qing.
Pour convaincre les dirigeants de la théocratie tibétaine, il ne restait plus qu'aux Qing de démontrer qu'ils étaient de grands protecteurs, eux aussi, du courant Vajrayana et la supériorité de leur empire sino-mandchou.
Rapidement
Yonghegong devint ainsi le symbole des échanges culturels entre les Qing et le Tibet. Le temple de Pékin se présenta rapidement comme un grand lieu d'étude théologique, ainsi que des mathématiques, de la médecine, de l'astrologie...
Encore aujourd'hui, le temple reste un puissant foyer du bouddhisme de la secte des Gelukpa dans la capitale chinoise et une vitrine politique du gouvernement chinois sur la liberté religieuse des lamaïstes...
Vestiges du palais princier, les tuiles d'or du temple et les Kuilongzi.
Pour voir toutes les photos, n'hésitez pas à visiter l'album photo Yonghegong!! Pour s'y rendre : Nom en français :
Temple des Lamas Nom chinois :
Yong He Gong (雍和宫)
Adresse : 28 avenue Yonghegong (Yonghegong Dajie), quartier Dong cheng
En métro : Ligne circulaire et ligne 5, arrêt Yonghegong.
En bus : lignes 13, 44 et 116, arrêt Yonghegong.
Horraires : 9H - 16H
Prix d'entrée : 25 Yuan
Bonne visite et Have fun!